Abstract
Dans cet article, je propose une exploration du phénomène du témoignage. Mon but est de montrer que la perspective phénoménologique rend possible une approche intégrative du témoignage, compris comme un phénomène qui engage la structure existentielle du sujet, articulant les relations entre langage, présence, mémoire, vérité et temporalité. Le témoin n’est pas seulement celui qui témoigne, mais d’abord celui qui affronte, dans sa présence expérientielle, un événement dont le sens est bouleversant et institue ainsi le sujet comme témoin : soit comme « témoin endurant » si l’enjeu est d’abord le soi le plus propre du témoin, ou comme « témoin oculaire»s’il s’agit principalement de l’autre. Le témoignage trouve sa signification particulière dans la tension qui se creuse entre le pôle ontologique, où le témoin est compris comme « être là » en présence de l’événement sur le plan expérientiel, et le pôle herméneutique, où le témoin est convoqué devant les autres au niveau du langage. Une autre différence doit être tracée entre le « témoin-confessant », lorsque le témoignage porte précisément sur ce que le témoin a enduré soi-même, et le « témoin-tiers », dont le témoignage porte sur ce que l’on a principalement observé sans le subir soi-même.